Le monde de la retraite est en pleine transformation. Le vieillissement de la population, l'augmentation de l'espérance de vie et l'incertitude entourant les rendements des placements sont autant de facteurs qui contribuent à ébranler les acquis des dernières décennies. Bien que les retraités actuels bénéficient encore des droits et privilèges qui s'y rattachent, des défis importants se présentent aux travailleurs d'aujourd'hui et de demain.
À cet égard, nous aborderons dans cet article le thème des régimes complémentaires de retraite offerts par l'employeur, qui se présentent sous deux formes, soit le régime de retraite à prestations déterminées (RRPD) et le régime de retraite à cotisations déterminées (RRCD).
Dans le RRPD et comme son nom l'indique, les prestations à la retraite sont déterminées, c'est-à-dire qu'elles sont définies à l'avance par une formule précise. Par exemple, la rente de retraite est égale à 70% de la moyenne des salaires des cinq dernières années de travail après 35 ans de service. Dans ce type de régime, c'est l'employeur qui assume le risque, puisqu'il doit injecter les fonds nécessaires en cas de déficit, et ce, selon des règles actuarielles établies en vertu des différentes lois et règlements applicables.
Depuis les dernières années, une combinaison de facteurs dont ceux énoncés ci-haut a pour effet de faire ressentir vigoureusement aux employeurs le poids monétaire associé aux RRPD, auquel s'ajoute une administration plutôt lourde et coûteuse. C'est pourquoi ils les remettent en question ou les remplacent au profit des RRCD, où le risque est relégué à l'employé. En effet, dans le RRCD et comme son nom l'indique aussi, le montant des cotisations versées par l'employeur et l'employé est déterminé. Par exemple, ils contribuent à raison de 3% chacun du salaire de l'employé. Le montant disponible à l'âge de la retraite dépendra alors des rendements obtenus durant la période active. Ici, ce n'est plus l'employeur qui assume les divers risques inhérents au régime, mais plutôt l'employé.
Mentionnons que le solde disponible à l'âge de la retraite devra soit être transféré à un fonds de revenu viager (FRV) faisant l'objet d'un encadrement au niveau des retraits minimum et maximum, soit utilisé pour constituer une rente viagère procurant un revenu stable. Dans la deuxième option, les taux d'intérêt en vigueur et anticipés sont déterminants en ce qui a trait au montant de la rente établi par l'assureur grâce à un calcul actuariel.
Bien qu'il libère l'employeur d'une obligation de taille, le RRCD soulève toutefois des inquiétudes du côté de l'employé. Parmi les risques observés et intimement liés les uns aux autres, on compte (1) celui qui concerne l'espérance de vie, (2) celui qui a trait aux rendements et à leur volatilité et (3) celui qui est associé à des cotisations insuffisantes ou à des retraits élevés. Examinons-les de plus près.
(1) Le risque lié à l'espérance de vie. Contrairement au RRPD, le RRCD ne garantit pas le versement à vie d'une rente prédéterminée durant les années de travail. Dans le cas où le solde disponible est converti en FRV, l'évolution du capital repose non seulement sur l'espérance de vie du participant, mais également sur les retraits qu'il effectue et les rendements qu'il obtient. Ainsi, tout dépendamment de ces variables, il pourrait assister à un effritement important de son fonds de retraite.
(2) Le risque lié aux rendements et à leur volatilité. Ce risque s'observe en période d'accumulation, puis aussi en période de décaissement dans le cas où le choix du FRV est retenu. L'incertitude des rendements, l'instabilité des marchés et l'aversion au risque des investisseurs sont des éléments difficiles à gérer qui ont un impact crucial sur le résultat qui sera obtenu par un participant au régime.
(3) Le risque lié à des cotisations insuffisantes ou à des retraits élevés.
Cotisations insuffisantes. Il se peut que les cotisations prévues dans le cadre de certains régimes ne soient pas suffisantes pour générer le revenu de retraite souhaité. Ainsi, il est conseillé de sélectionner l'option qui maximise la cotisation de l'employeur, lorsque différentes possibilités sont offertes.
Retraits trop importants. Évidemment, des retraits élevés d'un FRV pourraient contribuer à une érosion prématurée du capital.
Un trop grand écart entre les scénarios envisagé et réalisé pourrait se traduire par la révision de l'âge prévu de la retraite ou par la modification des retraits projetés. Il faut noter qu'à ces risques s'ajoute le fait que l'employé est somme toute laissé à lui-même dans la gestion de son régime.
Prenons un exemple simplifié dans lequel nous ne considérerons pas les retraits minimum et maximum imposés dans le FRV afin d'illustrer la différence potentielle entre les deux types de régime.
Dans le cadre d'un RRPD de type salaire moyen de carrière offrant une prestation de 70% après 35 ans de service, un participant dont le salaire moyen a été de 50 000$ recevra 35 000$ par année durant toute sa vie dès lors qu'il atteindra l'âge admissible à la retraite. Dans le cadre d'un RRCD et avec comme hypothèses le même salaire (nivelé aux fins de l'exemple), le même nombre d'années de service et un taux de rendement annuel moyen de 5%, une cotisation de 8% est requise afin d'assurer le même niveau de revenu, mais seulement jusqu'à une espérance de vie de 80 ans ! Il faut que la cotisation soit de 12.75% afin de permettre à ce participant de bénéficier du revenu jusqu'à l'âge de 100 ans. Ajoutons qu'il n'est pas rare que les RRPD prévoient des rentes indexées au coût de la vie, ce qui creuse encore davantage la différence entre les deux types de régimes.
Cet exemple illustre que nombre d'employés qui participent à un RRCD devraient également prévoir d'épargner via le REER afin de s'assurer d'une retraite dont ils rêvent ou du moins qui leur permettra de maintenir le niveau de vie auquel ils sont habitués durant leur vie active. Il n'en demeure pas moins que cela requière de la discipline, tandis que le coût de la vie est élevé d'un point de vue de la capacité à épargner.
En définitive, s'il est difficile pour les employeurs de gérer les régimes de pension, comment les employés y parviendront-ils ? De plus, quelle sera l'évolution des régimes publics de retraite (PSV, RRQ) qui avaient surtout pour mission d'assurer les vieux jours des aînés, alors que la période de la retraite occupe une part de plus en plus importante des différentes étapes de la vie ?
Sources :
Bergeron, Pierre (2010). « L'avenir des régimes de retraite à prestations déterminées est-il compromis ? », Conseiller. Récupéré de http://www.conseiller.ca/nouvelles/l%E2%80%99avenir-des-regimes-de-retraite-a-prestations-determinees-est-il-compromis-26948.
Conseiller (2014). « Les retraites : un défi à l'échelle internationale ». Récupéré de http://www.conseiller.ca/nouvelles/les-retraites-un-defi-a-lechelle-internationale-45066.
Iarocci, Nick (2011). « Régimes de retraite CD : un défi pour vos clients », Conseiller. Récupéré de http://www.conseiller.ca/nouvelles/constituer-votre-portefeuille-28888.
L. Brown, Robert (2013). « Le régime de retraite à prestations déterminées est dépassé », Le Huffington Post. Récupéré de http://quebec.huffingtonpost.ca/robert-l-brown/regime-retraite-prestations-determinees-avenir_b_3333867.html.
Les Affaires (2014). « Régimes à prestations déterminées : le quart des employeurs veulent s'en débarrasser ». Récupéré de http://www.lesaffaires.com/mes-finances/retraite/regimes-a-prestations-determinees-le-quart-des-employeurs-veulent-sen-debarrasser/571102.
Régie des rentes du Québec (2008). Les revenus de retraite au Québec : Déterminants de la situation actuelle et projection jusqu'en 2035. Récupéré de https://www.rrq.gouv.qc.ca/SiteCollectionDocuments/www.rrq.gouv.qc/Francais/publications/etudes/etude_revenus_retraite.pdf.
Retraite Québec (2016). Prestations vs. cotisations ?. Récupéré le 5 janvier 2017 de http://www.questionretraite.ca/chroniques/prestations-vs-cotisations/.